Le Parti socialiste n'est pas un parti de cambrioleurs de propriété et de détrousseurs de biens. Il ne vole pas, il restitue. Il ne vide pas les porte-monnaies, il les emplit. Il n'exproprie pas le monde du travail, il fait rendre gorge aux expropriateurs. Et s'il entend transformer la propriété capitaliste en propriété collective, sociale, a-t-il le plus profond respect pour la petite propriété où l'union entre le capital et le travail existe toujours et où le propriétaire manœuvre lui-même ses outils de production, ce qui est le cas des ruraux faisant valoir directement les parcelles de terre qu'ils possèdent et qu'ils ont acquises grâce à leur labeur incessant à force de privations et d'économies. Ce que nous voulons en rendant la terre à celui qui la cultive pour le compte d'autrui, en maintenant la propriété dans les mains de celui qui la féconde de son labeur, en cherchant à venir en aide aux petits exploitants agricoles, c'est assurer à nos campagnards un droit de propriété définitive et les entraîner à des formes supérieures de travail et vers un stade de civilisation plus élevé. Quant à préciser d'une façon certaine quelles seront les modalités exactes de l'exploitation agricole de demain, c'est inutile. Pour que la terre donne tout ce qu'elle est susceptible de donner, il faut qu'elle appartienne à ceux qui l'exploitent. Qu'elle soit mise en état de produire par une famille ou par une collectivité, ce qui est nécessaire avant tout c'est que ce soit par des travailleurs ayant profit à la bien cultiver, la terre ne supportant pas une exploitation désintéressée et irresponsable. Dès le moment où l'union du paysan et de la propriété aura supprimé le prolétariat rural, peu importe que la mise en valeur de la terre se fasse ici sous la forme individuelle, plus loin sous la forme collective, coopérative, syndicale, communale ou sociale, la mise en culture du sol conçue scientifiquement, exécutée méthodiquement, ne permettra-t-elle pas aux êtres humains, à tous les êtres humains, de consommer suivant leurs besoins. L'exploitation de l'homme par l'homme étant à jamais abolie, les travailleurs de la terre ainsi que les autres travailleurs ne jouiront-ils pas d'une liberté qui leur était jusqu'ici inconnue. C'est ce but que poursuit le socialisme dont le noble et prestigieux idéal suscite par le monde les plus grandes et les plus légitimes espérances.