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Titre :Le nouvel ilote : Les idées c'est comme les autres capitaux, c'est encore plus difficile à conserver qu'à acquérir
Compositeur(s) et-ou auteur(s) :la Fouchardière, Georges de
Interprète(s) :Clarens, Jean [Jean-Jacques Denis Paul Télémaque Valant]
Genre :Discours de circonstance
Fichier audio :
Photo(s) :Photo
Support d'enregistrement :Disque
Format :30 cm aiguille (enregistrement électrique)
Lieu d'enregistrement :Paris, France
Marque de fabrique, label :Ligue française de l'enseignement (fédération de S. et O.) - Collection scolaphone - enregistrement VEG-∆
Numéro de catalogue :Série hygiène B.J.33
Date de l'enregistrement :1932
Instruments :Monologue
Vitesse (tours/minute) :78
Matériel employé au transfert :Stanton 150, pointe 2,2ET sur Shure, Elberg MD12 : courbe Westrex, Cedar duo declickle
Date du transfert :04-10-2024
Commentaires :Texte du contenu ci-joint. Action sociale, Franc-maçonnerie. On trouve "Le Nouvel ilote, extrtaits du disque en vente à la Ligue nationale contre l'alcoolisme", dans "La Jeunesse : revue de l'Association de la jeunesse française tempérante", juillet-août 1933, n°7-8, p. 110-111 (https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3262972x)
Texte du contenu :Le nouvel ilote

Texte de Georges de la Fouchardière, dit par Jean Clarens [Jean-Jacques Denis Paul Télémaque Valant]
Ligue française de l'enseignement (fédération de S. et O.) - Collection scolaphone - enregistrement VEG-∆, Série hygiène B.J.33 (1932).

Les idées c'est comme les autres capitaux. C'est encore plus difficile à conserver qu'à acquérir. Lorsqu'avec beaucoup de mal, on est arrivé à se faire sur quelque chose sa petite opinion personnelle. On est tout le temps obligé de la défendre avec acharnement, avec âpreté, avec mauvaise foi contre les faits, contre la logique, contre l'évidence, même. Il me semblait bien être dans l'axe de la pure vérité et sous l'égide de la Saint-Justice, en prenant parti pour les humides contre les secs, dans la grande queurelle qui agite les États-Unis. La liberté de boire me paraissait un des droits imprescritibles de l'homme, et la licence de trop boire à mon avis ne devait avoir qu'un juge et un justiciable en une même personne, l'homme qui tient le père.

Or, samedi soir sortant du métro par une dés stations d'Auteuil, j'ai vu un groupe d'ouvriers chargés de leurs outils et arrêtés à la porte d'un marchand de vin. L'un des ouvriers tenait par la main un enfant de quatre à six ans, l'enfant au tranblotait de ses membres inachevés qui paraissaient dépourvus d'os, ses gros yeux vitreux n'avaient pas l'expression humaine, il bavait sur les haillons dégoûtants qui par place, découvraient sa chair décomposée. J' pensais d'abord que si cet enfant avait une mère, la mère était une bien grande criminelle. J'appris une heure plus tard que la mère était morte, et qu'une voisine veillait sur l'enfant dont les frères et sœurs étaient répartis entre divers hospices et cimetières de Paris.

Et chaque samedi, jour de paix, la voisine avec les meilleures intentions du monde conduisait le misérable petit à son père à la sortie de l'atelier, afin que l'ouvrier fût obligé de rentrer directement chez lui. En quoi la voisine se faisait d'étranges illusions. Cependant le groupe des ouvriers restait indécis et comme honteux devant l'établissement du bistro. "Alors quoi, vous venez", dit l'homme qui traînait l'enfant, "puisque je vous dis que c'est moi que je paie la tournée". Les camarades sentirent peser sur eux, le regard des passants, dont quelques-uns s'étaient arrêtés. Ils répondient d'un air gêné. "Non, merci, ça sera pour une autre fois".

Ils abandonnèrent le camarade, qui bravement, seul, avec son terrifiant avorton pénétra chez le bistro. Une bonne dame sur le passage des ouvriers murmura. "C'est bien de votre part. Mais ça serait encore mieux si vous faisiez comprendre à votre ami". Ils haussèrent les épaules. Je ne dis rien. J'avais peur qu'un de ces hommes me servît ma propre théorie sur les secs et les humides. Mais maintenant, que j' n'ai plus plus sous les yeux se spectacle abject, la théorie reprend toute sa force implacable. Une chose n'est mauvaise que par l'abus qu'on en fait. L'abus qu'en font quelques-uns, n'est pas une raison suffisante pour en interdire l'usage à tous les autres. Interdirez-vous l'amour, cause de coups de couteau ou de revolver, qui sont le témoignage fréquent d'une passion exagérée ? Interdirez-vous la musique parce que votre voisine intoxiquée par La Madelon de la victoire, abuse de vos nerfs en vous jouant cet air-là six heures par jour depuis 15 mois ? Supprimerez-vous la liberté à cause des crimes qui se commettent chaque jour en son nom ?

En bonne logique, et par les mêmes raisons qui l'auront fait décider la suppression des boissons alcooliques, les secs devraient abolir l'amour, la musique, et la liberté. Mais pour raisonner aussi raisonnablement sur les causes, il faut n'avoir pas les effets sous les yeux. C'est pourquoi je conseille à la Ligue contre l'alcoolisme d'engager pour sa propagande le numéro que j'ai vu samedi à Auteil. Il lui suffira d'ouvrir à l'homme un crédit illimité chez tous les bistros de Paris, à condition qu'il emmène son enfant avec lui. La vue du père et du fils, coupera la soif à bien des gens, et le misérable petit ilote de quatre ans remplira ainsi le rôle inconscient d'apôtre ou d'hostie offerte en rémission de tous les ivrognes, jusqu'au jour où le poison éteindra définitivement son inconscient, sa misérable petite existence. C'est ce que je lui souhaite tout mon coeur.



Permalien : http://www.old.phonobase.org/16749.html

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