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Il est un mot qu'on n'entend guère
Si c' n'est dans la vie militaire
C'est un command'ment connu d' tous :
Garde à vous ! garde à vous !
Et pourtant, dans la vie civile
Que de fois il serait utile
De crier à de pauvres fous :
Garde à vous ! garde à vous !
Vous aimez une jeune fille
Vous la trouvez douce et gentille
Vite, vous faites les yeux doux
Garde à vous ! garde à vous !
Elle est jeune, elle est adorable
Elle est mignonne, elle est aimable
Mais quand vous serez son époux
Garde à vous ! garde à vous !
Quand vous vous trouvez dans la rue
Dans la foule, dans la cohue
Évitez les fous et les coups
Garde à vous ! garde à vous !
Méfiez-vous aussi de l'apache
Qui se dissimule et se cache
Pour vous barboter vos bijoux
Garde à vous ! garde à vous !
Pour mieux attraper votre vote
On vous promet du beurre en motte
Du bonheur et des r'traites pour tous
Garde à vous ! garde à vous !
Gare aux beaux discours des quinze mille (*)
C'est des boniments d' crocodile
Pour vous soutirer vos gros sous
Garde à vous ! garde à vous !
Garde à vous, les fils de famille
Qui lancez à grands frais des filles
Auxquelles vous servez de joujoux
Garde à vous ! garde à vous !
On peut quoique étant très honnête
À ce jeu-là perdre la tête
Et l'expier sous les verrous
Garde à vous ! garde à vous !
Et vous, messieurs les bons apôtres
Vous, les diseurs de patenôtres
Vous qui combattiez à genoux
Garde à vous ! garde à vous !
Quand reviendront les jours d'alarmes
Il vous faudra prendre les armes
Et marcher au feu comme nous
Garde à vous ! garde à vous !
Républicains, légitimistes
Bonapartistes, socialistes
Français, mes frères, unissons-nous
Garde à vous ! garde à vous !
Et quand la France, notre mère
Nous criera : Sus à la frontière !
Ce jour-là, nous y serons tous
Garde à vous ! garde à vous !
(*) augmentation de l'indemnité parlementaire de neuf mille à quinze mille francs par an (22 novembre 1906)