Depuis hier soir, dit votre femme
Je veux maintenant, mon très cher époux
Vous faire connaître quel sera l' programme
De la vie nouvelle qui s'ouvre devant nous
Vous n'avez pensé dans ce sacrifice
Qu'à vous-même sûr'ment, à moi pas du tout
Rétablissons donc les p'tits bénéfices
Que devra tirer maint'nant chacun d' nous
Je suis une vieille femme laide et ridicule
Qui aura bientôt trente ans d' plus que vous
Vrai, vous m'avez prise sans aucun scrupule
Car je suis très riche et vous sans-le-sou
Vous avez par contre jeunesse et courage
La beauté, la force et l' titre de baron
Qu' vous avez troqué en faisant c' mariage
Tout c'la pour pouvoir r'dorer votre blason
C'est donc entre nous une sorte d'échange
De bons procédés comme deux associés
Vous aurez maint'nant l' bonheur sans mélange
La fortune, le luxe et l'oisiveté
Moi, de mon côté, j'ai l' cœur jeune encore
Et comme intérêts de mon capital
Je vous d'mand'rai seul'ment, car je vous adore
L'accomplissement du d'voir conjugal
Je suis sûre qu'au fond vous faites la grimace
Ça doit dérouter tous vos p'tits projets
Car vous auriez eu sûrement l'audace
De prendre une maîtresse, ça serait l' bouquet !
Vous pensiez avoir une femme pour la forme
Une bonne maman qui ferm'rait les yeux
Sur vos p'tites fredaines, mais je vous informe :
Si vous d'vez en faire, ça s'ra tous les deux
Bref, pour terminer, j' vous dirais encore
Que rien n' vous manqu'ra, mon très cher époux
Et pour vous prouver que je vous adore
Très jalousement je veill'rai sur vous
Pour vous éviter de faire des folies
D' gaspiller mes rentes sans aucun remords
Je tiendrai moi-même mes comptes toute ma vie
Et j' gard'rai la clef de notre coffre-fort