Montéhus (1907) - Éditeur : À la librairie parisienne d'éditions populaires, Paris
Il fait bien froid et la neige blanche
Tombe et tapisse le mur des maisons,
Des arbres nus, les grandes branches
Ont l'air d' pleurer la belle saison
Bravant le vent, bravant la froide bise
Une pauvre mère en portant son enfant,
Est là pleurant, sur les marches d'une église
Criant : Pitié ! oui, pitié aux passants.
Pendant qu'on fête le doux Jésus,
De pauvres mères s'en vont pieds nus.
"Minuit chrétien, c'est l'heure solennelle"
Si c'était vrai, dit la mère en pleurant,
J'aurais du lait dans mes mamelles,
Et je pourrais sauver mon enfant.
"Peuple à genoux, attends ta délivrance"
J'y suis, dit-elle, et mon petit se meurt.
Si tu existes, fais cesser ma souffrance,
Oh ! toi Jésus qu'on appelle le sauveur,
Pendant qu'on fête ta bienvenue,
De pauvres mères pleurent dans la rue.
C'est pas pour faire de la morale.
Non ! mais au lieu d'attendre des r'venants,
Et d' leur bâtir des cathédrales,
Faites des maisons pour tous les vivants,
Ou bien alors, quand souffle la froide bise
Soyez humains, vous qui parlez de Dieu
À deux battants, ouvrez toutes vos églises
Et que vos cloches appellent les malheureux
Jésus qu'était républicain,
Aux malheureux tendait la main !